Prudence lors des recrutements
Dans le monde actuel où les données sont de plus en plus exposées sur internet, de manière volontaire ou pas, il est tentant d’effectuer des recherches pour connaître des détails concernant une personne, notamment si vous avez l’intention de l’embaucher. Ces recherches pourraient vous donner un aperçu de sa personnalité, et même découvrir des informations qui ne vous seront pas communiquées lors des entretiens d’embauche.
Pour autant, il est essentiel que les employeurs respectent les règles en matière de collecte des données pour se conformer aux obligations du RGPD et éviter de sévères sanctions.
Le principe de minimisation
Le recrutement doit suivre l’un des principes fondamentaux du RGPD : celui de la minimisation des données. Cela signifie que seules les informations essentielles à l'évaluation de la candidature pour un poste précis doivent être collectées. Selon l'article 5.1.c du RGPD, les données recueillies doivent être adéquates, pertinentes et limitées à ce qui est nécessaire aux fins pour lesquelles elles sont traitées.
Mais est-ce bien respecté ?
Cas de mise en demeure par la CNIL
La CNIL a récemment mis en demeure une société pour collecte excessive de données lors du recrutement. Cette société avait collecté des données non pertinentes telles que le lieu de naissance, la nationalité, le montant des salaires précédemment perçus, et même des détails relatifs aux membres de la famille des candidats. Cette collecte constitue un manquement au principe de minimisation des données.
La réglementation exige que les données collectées soient directement liées à l'évaluation des compétences professionnelles des candidats.
Rappel de la Cour de cassation
Dans un arrêt du 30 avril 2024, la Cour de cassation a sanctionné une collecte déloyale de données personnelles, soulignant que même des informations publiquement accessibles ne peuvent être collectées. En effet, les personnes concernées ne sont dans ce cas, ni informée, ni en capacité de s’y opposer.
Dans cette affaire, un employeur avait sollicité les services d’un enquêteur privé pour réaliser des investigations sur ses salariés, clients et même des candidats à l’embauche.
La collecte de ces données est alors considérée comme déloyale, les données ayant été collectées à leur insu.
Et si ce n’était pas suffisant, les données collectées ont été utilisées à des fins de profilage.
A ne pas prendre à la légère !
L’actualité du RGPD, et notamment les sanctions rendues publiques par la CNIL et les juridictions, nous montrent que dans la grande majorité des cas, seules les personnes morales sont sanctionnées : mise en demeure, sanctions pécuniaires, etc.
Dans notre cas présent, les juges ont sanctionné une personne physique !
Ces faits rappellent donc que chaque personne a un droit au respect de sa vie privée. Chacun est libre de pouvoir s’exprimer dans la sphère privée sans qu’il y ait de conséquence pour sa carrière et son avenir professionnel. Des informations qui n’ont pas de rapport direct avec l’emploi d’une personne ne doivent pas être prises en compte.
Les employeurs doivent donc revoir régulièrement leurs politiques de recrutement et s'assurer que leur collecte de données est conforme aux exigences du RGPD, favorisant ainsi un environnement professionnel respectueux de la vie privée et des droits individuels.